INDO-EUROPÉEN
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EUSKARA
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Nº 18
Le suffixe /*-(e/o)nt/ :
Donne des participes présents et des aoristes actifs,
/*es/ être
→ /*es-/*s-/,
thème de présent à suffixe zéro
→/*s-é/ont-/
étant, lat. sent-
étant et sont coupable.
Mais ces formations déverbatives sont issues dune
formation originelle dénominale, comme /*to/;
/*(e/o)nt-/
est initialement un suffixe dénominatif possessif, véd.
br̥h-ant- puissant
est *possesseur de br̥h,
ce quexprime également le composé bŕ̥has-páti
maître, possesseur de br̥h.
Cette valeur est bien attestée en hitt. : peruna-
rocher → perun-ant-
rocher ; en germ. : *xrind-
boeuf (all. rind)
repose sur *kr̥-ent cornu
et elle se trouve dans la forme élargie *-went-
(infra).
Cette origine explique les emplois de /*(e/o)nt-/
comme médio-passif, lat. gignentia
la descendance de gingnuntur.
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En euskera, les origines du suffixe semblent
diverses.
Les correspondants bsq, de ce suffixe i.-e. nont pas
le
/t/ final, sauf à certaines flexions (élatif
singulier et le
cas obliques du pluriel). Il se trouve sans dentale dans
des participes présents, actifs et passifs :
/UN/ ayant → substantif BURRUN
fer ← /BUR/
feu (cf. gr. πûρ
(pūr) → πυρωτής
(purōtēs)
forgeron), Azk. I, 185 BURRUÑA
fer. Cf. PIKUN
bec de lièvre, litt. pourvu de bec.
LIZUN
marécageux ← /*LIZ-/
mouillère ← /UREZ/ULEZ/
(/Z/ instrumental) = deau.
ZURRUN sentier (funèbre)
← ZURRU- couler, litt.
rigole, cf. gr. ῥοος
(ϝroos) courant dun fleuve
et skr. sruti chemin,
rue. BAION ← IBAION, de
/IBAI/
cours deau, fleuve et /ON/ ayant,
pourvu de.
KARRUN/KARRU glace
← /KAR/ pierre, litt. pétrifié,
cf. gr. κρύος
(kruos) froid qui glace, qui fait frissonner.
Des comparatifs : GEHIEN ← GARAIEN
aîné,
supérieur, sur la base de /GAR-/ tête
+ article
dèfinitif/pronom /A/ + /I/ locatif + /EN/
génitif extractif
comparatif de supériorité, litt. le plus
haut ; cf. gr.
κρείων
(kreíōn), th. II, maître, souverain
dit
dAgamemnon εὐρὺ
κρείων/skr. pr̥thu-śrī
dont la
puissance sétend au loin, génitif
κρεοντος
la dentale
résulterait « dun élargissement secondaire
/τ/ comme
dans dautres mots grecs (ἄκων,
δράκων, θεράπων,
λέων) » Chtr. 1410-1411. |
Suffixe /*-(e/o)nt/
: (suite)
Pierre CHANTRAINE, 580 : « Les anciens voyaient dans ce mot
[κρείων]
un participe. Aujourdhui, on saccorde à penser que la
flexion avec dentale est secondaire, daprès ἄρχων
"chef" [litt. "le plus en avant" ← bsq.
AUR-KO-EN], μέδων
(médōn) commandant, etc., et lon pense à
une forme comparative que lon rapproche du comparatif indo-iran.,
avest. srayah-, skr. śréyas
(/e/ secondaire pour /a/)
». Mais Charles de LAMBERTERIE, à la p. 1490 du supplément
au dictionnaire de CHANTRAINE, émet une autre position : «
J. NARTEN, ZVS 100, 1987, 270-96, pose le participe dun thème
verbal /*k̑réyh-e/o/, essif [...]
il sagirait déclat plus que de puissance... ».
Le bsq. GARAIEN/GEIHEN est bien un comparatif : LEHEN,
autre comparatif bsq. premier, en premier lieu, autrefois,
auparavant, premier par lâge, le rang, etc →
LENDAKARI président, dérivé de LEHI
désirer, vouloir, souhaiter, donc LEHIEN superlatif
→ LEHEN. Cf. gr. λī̓ων
(lōīōn) meilleur,
plus favorable, plus agréable. Chtr. 654 : « Kleine
Schriften a soutenu que le thème de comparatif [dun adjectif
λωιος] était
originel [...] on a rapproché depuis longtemps le radical /λη-/
(alternant avec /λω-/) du
verbe λῶ, λῆν
vouloir ».
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des génitifs formels, immotivés depuis
longtemps pour les locuteurs de leuskera, comme le sont pour
les allemands les formes telles que all. rind
du germanique xrind- boeuf
reposant sur /*kr-ent-/ pourvu
de cornes, cornu. Cf. bsq. (H)OREIN cervidé
: daim, cerf, élan → orignal
du Canada. Formellement = de la tête, (la
chose) de sur la tête, soit corne ; lat. cornū
corne est de structure et de sens identique ; le got.
haurn corne également.
Bsq. (H)OREIN cerf et germanique xrind-
boeuf sont donc des synecdoques. Bsq. GORA haut,
élevé repose aussi sur /GAR-/ tête/gr.
κάρᾱ (kárā)
tête, du plus lontain /KAR-/ caillou,
pierre, roche. Sy rattachent gr. κέρας
(keras) corne, gall. carw
cerf, lat. ceruus
id., gr. κόρυς
(korus), κορυθος
(koruthos) casque, gr. κορυφή
(koruphē) sommet, κόρυμϐος
(corumbos) corymbe, etc.
Cf. bsq. XURANDOR, Lh. 1053 : XUHANDOR cornouiller,
bot. cornuta más, arbuste
dont le bois est très dur. Mot composé de /XURAN/
et /DOR/. Les correspondants lat. cornus
cornouiller et cerisier sauvage, gr. κράνον
(kranon) cornouiller facilitent linterprétation
de /XURAN/, th. I, comme KARAN/HARAN prunelle,
prune et lat. cerasus cerisier,
hitt. kirnis dieu protecteur
des cerisiers, etc. Bsq. /XURAN/ doit probablement, comme
le germanique xrind-, signifier
corné sinon cornu. Cest en effet
de la même racine de bsq. /KAR/ pierre que
dérive GOR/KOR dur et « i.-e.
/*ker/*kor/
qui désigne les objets durs », M. 144. Pour lat. cerasus
cerisier et bsq. KARAN/HARAN prunelle, prune,
la racine se réfère au noyau, dur comme corne. Le deuxième
terme /DOR/ de XURANDOR doit signifier bois,
cf. gr. δόρυ
(doru) arbre, bois, planche, Chtr. 294 : « le mot
équivaut au terme plus ancien ἔγχος
(enkhos) »/bsq. UNKHU souche ; /DOR/
se retrouve sans doute dans le composé bsq. DOLAMAHAIN
établi de menuisier.
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Des aoristes actifs et passifs, en nasale :
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/(E)MAI-/ donner →
EMANA qui a été donné
= le donné, cf. MAIOZU donnez-lui. |
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/UKAI-/recevoir, avoir
→ UKANA qui a été reçu,
le reçu. |
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/JAT-/DJAT-/ manger
→ JANA qui a été mangé
= le mangé, qui a mangé
et même le manger, lalimentation. Lidée
verbale pure quexprime laoriste va ici jusquà
signifier le nom daction. |
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/EHAIN/EHUN/ moudre, tisser,
tuer de /*HON/ → /JO-/HO-/
frapper, battre, cf. lat. funus
meurtre, mort, anéantissement, funérailles,
gr. θείνω
(theinō) tuer. Forme bien distincte de lautre
aoriste, quon dira sigmatique, dont la sifflante
est le /z/ (/s/ latin)
de lauxiliant /*IZ-/ être
: EGOITZ-I battre, abattre ←
JO IZANA de leuskera moderne. La nasale du premier
aoriste pourrait être la désinence de prétérit,
cf. N-EN-GO-EN je demeurais qui révèle
lorigine de laugment (gr. *ἔ(ν)-λυο-(ε)ν
→ ἔλυον
: /*EN/ alors. |
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